J'avais prédit il y a quelques années la mort prochaine du cinéma. Le long-métrage n'a plus pour lui que des budgets supérieurs et la magie de la salle où il est projeté (encore que quand un troupeau d'adolescents glousse juste derrière toi en s'empiffrant de pop-corn, la magie tu peux te la foutre au cul). Pour le budget, c'est de moins en moins vrai ; un The Boys n'a pas à rougir face à un film de la Marvel dont il fait un meilleur usage des effets spéciaux.
Impossible pour un film de procurer le même sentiment d'attachement à des personnages qu'une série ou qu'un mini-série, voilà où le bat blesse. La mini-série, justement, parlons-en. Le scénariste peut prendre son temps pour développer son histoire, et on ne risque pas de sombrer dans de misérables considérations mercantiles et l'acharnement thérapeutique comme c'est le cas, par exemple - et ils ne manquent pas - de The walking dead dont la qualité ne cesse de dégringoler depuis la saison 4.
Le jeu de la dame, mauvaise traduction de Queen's gambit, incarne totalement ce nouvel élan donné à la fiction. Sept épisodes seulement, mais dont pas une minute n'est superflue.
Comme l'incroyable Whiplash, il s'agit d'une oeuvre sur la passion dévorante, un thème qui m'est cher. Il n'y a rien de plus beau qu'un individu prêt à tout donner, sa vie, son temps et sa santé mentale, pour son art et y devenir le meilleur. La passion, c'est le côté lumineux du fanatisme. C'est de moi, sers-toi.
Il y est questions d'échecs, le jeu, mais pas la peine de connaître les règles et d'avoir fait une partie dans sa vie pour être happé par l'essor de cette prodige. Je suppose que quiconque regardera cette série verra l'idée de s'y mettre affleurer à son esprit, que ce soit sur internet contre des inconnus ou devant un véritable échiquier.
C'est aussi une ode au féminisme. Attention, pas le féminisme tarte, lourdingue, pas le féminisme crétin du dernier Avengers ou le féminisme pouffiasse de Sex and the city. Non, cette gamine rudoyée par la vie et dont la principale caractéristique est une intelligence folle, trace sa route contre vents et marées, et voilà qui est bien plus efficace pour plaider la cause femelle.
De ci de là, ça m'a beaucoup rappelé Mad Men, et pas seulement parce qu'on est en plein dans les sixties. J'y ai retrouvé le même refus de la sensiblerie, le même refus des clichés, les mêmes micro-digressions qui apportent de la profondeur aux personnages. Alors qu'une série comme Star Trek Discovery synthétise tout ce qu'est une série médiocre en termes d'écriture (ouais, c'est gratuit, mais j'ai rarement vu quelque chose d'aussi NUL), Le jeu de la dame est tout le contraire. Je n'ai jamais réussi à deviner où l'histoire allait. Et c'est pour cela que je n'ai jamais décroché.
Comment conclure sans parler de la performance géniale de l'actrice principale, à la fois sensuelle, animale, perchée et d'une classe folle. Mais bordel, où est-ce qu'ils les trouvent leurs acteurs, chez Netflix ? Assurément, pas chez Netto comme les nôtres.
La prochaine fois je te causerai de The terror, sur lequel j'ai aussi beaucoup à te dire.
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